C'est le 16 mai 1975 qu'Henri Sauldubois et son épouse se présentent à la mairie de Montbéliard à l'occasion de leurs noces d'or. Ils sont reçus par M. Domon, l'adjoint au maire. L'archiprêtre de Montbéliard, M. le curé Vionnet, les accueille ainsi que leurs invités, à Saint Mainboeuf, ce même jour pour la cérémonie religieuse. C'est entourés de leurs enfants, petits-enfants, parents et amis qu'ils réentendent, avec émotion, la lecture de l'acte de mariage du 16 mai 1925. "Cinquante années de bonheur, telle est l'image reflétée par M. et Mme Sauldubois" dit M. Domon.   

Au fil des conversations qui se nouent ce jour là, l’artiste laisse échapper qu'une prochaine exposition est en préparation. De fait, elle a lieu un an plus tard du 15 au 30 mai 1976, à la MJC de la rue du Mont-Bart. Henri Sauldubois en conçoit lui-même l'affichette : le profil de tante Climène, avec cette inscription : "Peintre témoin de son temps."   

            Quelques toiles bien campées nous rappellent "le bon vieux temps", mémorisant la tradition des chanteurs du Nouvel An, le soir de la Saint-Sylvestre, dans un village de la vallée du Rupt, l'arrivée à cheval du "promis" dans la cour de la ferme, le vieux Montbéliard (la Schliffe, le Pont de la Rouchotte, le quai des tanneurs, le Coinot, la Lizaine vue de la poste, la rue des Tours, les Halles…).

Une toile, de taille assez importante (170 x 110 cm), retient l'attention de nombreux visiteurs : la Noce à Clairegoutte. Le temple de Clairegoutte, tout en grès rose des Vosges, a inspiré notre artiste, bien qu'il soit d'architecture assez austère (la partie ancienne de l'édifice date de 1731 et la tour carrée du clocher de 1777). C'est sur ses larges escaliers de pierres grises qu'il campe les personnages si divers de la noce.   

Sauldubois ne s'est pas cantonné dans le passé uniquement. Des pastels bien colorés de fleurs des champs, de cerisiers si beaux en automne et même au printemps avec leur robe blanche, disent sa fidélité à dame Nature. Par ailleurs, il a planté son chevalet devant les forges d’Audincourt, alors en pleine activité. La ZUP, fraîchement construite, a retenu son attention. Une huile la représente vue depuis le dernier étage du lycée Cuvier aux Grands Jardins.             

Les Montbéliardais, jeunes et moins jeunes, se retrouvent en ce lieu. Certains découvrent, d'autres se souviennent, d'autant plus qu'à cette époque les travaux de recouvrement de la Lizaine démarrent, faisant ainsi disparaître la maison du maréchal-ferrant Boéglin (située à l'angle de l'avenue Georges Clemenceau, côté Coinot). Des arbres disparaissent pour élargir l'avenue des Fossés. Le visage de notre bonne ville de Montbéliard continue de bouger...

Les années douloureuses 1976 / 1981

 

Hélas, durant cette même année 1976, notre père, est victime d'une congestion cérébrale. Il est admis au centre hospitalier de Montbéliard. Il faut laisser aux médicaments le temps de faire leur travail, mais de toute évidence le bras droit et surtout la main sont atteints... Période pénible et doublement douloureuse pour lui, notre mère et nous tous. Des séances de kinésithérapie ramènent un peu de souplesse dans cette main et un peu d'espoir aussi. Je le vois encore s'appliquant comme un écolier à faire des lignes d'écriture, des exercices de pâte à modeler, pour remettre en route cette main. Mais ces doigts, qui avaient tant travaillé et sans lesquels nous n'aurions pas tous ces tableaux et souvenirs, ces portions de notre petite patrie, de notre si cher Pays de Montbéliard, refusent d’obéir totalement....  Les mois s'écoulent, mais le moral n'y est plus. Il faut pourtant bien arriver à l'acceptation de ces séquelles. Notre mère l'épaule merveilleusement durant toute cette période. Beaucoup de visites, de lettres, de messages téléphoniques, de témoignages d'amitié de toutes sortes viennent apporter leur réconfort. L’épreuve persiste pourtant de ne plus pouvoir peindre…             

En cette fin mars 1981, nous fêtons l'anniversaire de notre mère en famille et avec ses fidèles amis Bringard et Sauter et leurs épouses. Leur surprise n'en sera que plus grande à l'annonce du décès d'Henri Sauldubois, quelques semaines après. En effet, il nous quitte le 28 avril 1981. Pour nous, il nous semble que c'était hier, tant il reste présent à nos pensées.  

Il était un homme de cœur et d'ouverture, indépendant, optimiste, maniant l'humour avec adresse et gentillesse, entreprenant. Il était croyant. C'était notre père, un vrai Montbéliardais et il était un artiste.  

Relisant ces quelques pages, je pense avoir fait de nombreux détours dans la vie de notre bonne ville, dans ses quartiers. Peut-être par nostalgie ? Non, plutôt pour témoigner un peu de la vie de ces dernières décennies et faire mieux connaître notre père et tout son amour du Pays.  

Je me permettrai quelques souhaits:

-puissent les générations montantes avoir un regard curieux, intéressé, pour aimer les lieux où ils vivent.

- puissent elles en conserver ce qui en fait l’âme.

- puissent elles savoir et également pratiquer que l'esprit d'initiative, d'entraide, de tolérance, a toujours permis de réaliser de grandes choses. 

Henry Sauldubois : 24 septembre 1898-28 avril 1981 : tout simplement montbéliardais / (Janine et Michel Pélier). - Bart 25420 Déposé 2001. - 61 p. : ill. en noir et en coul., couv. ill. en coul. ; 30 cm.
Titre de couv. : "H. Sauldubois, peintre témoin de son temps". - DL 01-23669 (D4). - 920 (Br.) : 150 F.
Sauldubois, Henry (1898-1981) -- Biographie
BN 02686124   01-48063